jeudi, février 23, 2006

La musique autour des bûchers



Ce n'est pas pour me vanter, mais je viens de relire "Le Trajet d'une rivière" d'Anne Cuneo. Nom de Dieu de bordel de moine, que c'est beau ! Le récit est une manière de biographie, partant de rares faits réels et allant à la reconstitution d'une belle vie tout entière. Et ça tue.

Le bouquin débute en Angleterre au XVIème siècle, dans le contexte des guerres de religion et de la contre-réforme. Nous sommes souvent familiers des persécutions dont furent victimes les protestants sur le continent ; les mêmes intolérances visèrent cependant outre-Manche les catholiques anglais. On enferme, on déporte, on crame à l'occasion. L'Espagne catholique lutte pour les Flandres. L'invincible Armada tend ses voiles. Henri IV tient la France, passant d'une religion à l'autre. Voilà pour la peinture de fond.



Parce que catholique, le héros du récit, Sir Francis Tregian, se retrouve ainsi pris malgré lui dans ce gigantesque bras de fer, dès l'enfance et durant toute sa vie. Drôle de bonhomme, Tregian. Musicien supposé, il compila des partitions aux quatre coins de l'Europe, sans que l'on sache trop pourquoi. Cuneo le dépeint virtuose, rencontrant Byrd, Monteverde ou encore Morley et passant la nuit avec eux à chanter et tripoter la Muse : le rendu est magnifique, donnant envie de se jeter dans leurs oeuvres respectives pour redécouvrir le souffle de l'époque. La façon dont M'dame Cuneo cause Musique ne porte pas une seconde son 1550, restant toujours actuelle en diable, vivante à plein-pied, de première fraîcheur, quoi.

Le zigue se retrouve courant l'Europe, changeant trois fois de nom, marchand à Amsterdam, musicien à Rome, nobliau dans les Cornouailles. L'époque est dure, parfois prise de coup de sang. Monter du Vatican à Paris prend alors trois semaines. La Franche-Comté est affamée, de même que le tiers de l'Europe. La peste renaît. Amsterdam vend ses étoffes, ses armes et ses bateaux à tous. Tregian passe au milieu de la grande Histoire, perdant des plumes, des amis, des amours. Seule reste la musique. Et la fuite.

A lire absolument.



La compilation de Tregian a eu sa petite postérité, permettant notamment de remettre à jour la richesse et la variété du pré-baroque et baroque anglais, etc. On l'appelle le Fitzwilliam Virginal Book, du nom de la famille du dernier proprio. Ressemble à ça.
Un choix de ses morceaux a récemment été sorti en CD, suite au livre de Cunéo. Une chouette critique en a été faite . Je vous propose un titre de Byrd qui figure dessus. Achetez l'album, il est réellement génial.

2 Comments:

Anonymous Anonyme said...

N’ayant pas su trouver le moyen de t’écrire par la messagerie directe du blog (existe-t-elle ?) je profite du désert de réaction pour t’envoyer un petit message perso : bien que cela fasse presque un an que ce blog existe, tu ne te décides à m’en parler qu’aujourd’hui (enfin hier), à la veille de mes exams. Si je ne voulais pas te voir physiquement, était-ce une raison pour venir me hanter virtuellement ? Pour mes lendemains gâchés par ta faute, sois maudis.
Le temps s’étant arrêté maintenant, je peux me laisser aller à un petit commentaire : bien que je n’ai lu pour l’instant que la première page, il faut que je me rende à nouveau à cette évidence, je t’adore ! pour débuter par Pennac, effleurer Maupassant, Despdoges…
La raison voudrait maintenant que je n’y goûte plus, telle la première cigarette. Si tu es héroïne, alors je suis fichue. Et tu te dis mon ami ?
Vas ! je ne te hais point, et surtout………………………continu !

2:59 PM  
Blogger totagata said...

point d'acide dau portrait. Merci ma grande.

2:32 PM  

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